Imprimer
Rien de plus banal, de nos jours, que de déguster une glace ou un sorbet. Un plaisir gourmand qui ne date pas d’hier puisqu’il remonte à l'Antiquité. Mais savez-vous que jusqu’à l’apparition de la réfrigération, au XIXème siècle, nos ancêtres ont dû accomplir de véritables exploits pour satisfaire ce besoin de fraîcheur ?

A partir de 1860, année de rattachement du Comté de Nice à la France, le tourisme se développe rapidement sur le littoral de la Côte d'Azur. La Riviera niçoise attire alors les familles royales, les souverains et les aristocrates de toute l'Europe. En plein été, il faut offrir des mets et boissons rafraichissants à la clientèle et conserver les denrées . La glace est alors indispensable pour alimenter les "chambres froides" des différents commerces. 

Or, avant l'invention des systèmes permettant de fabriquer artificiellement de la glace, les poissonneries, pâtisseries, restaurants et cafés du littoral étaient approvisionnés en glace pendant l’été par des glacières aménagées dans les vallées du Mercantour notamment. 

Les glacières étaient construites dans des zones froides, souvent à l'ubac et dans des zones boisées, pour obtenir une glace de bonne qualité et faciliter sa conservation. Il fallait choisir des sites situés à des distances acceptables du littoral (une nuit) pour limiter les pertes. Les glacières étaient toutes bâties sur le même modèle : en pierre sèche, de forme circulaire, creusées dans le sol, d'un diamètre de 6 mètres et d'une profondeur de 8 mètres.

Pour obtenir de la glace et remplir les puits, deux techniques étaient utilisées :

  • Les pièges à neige : on ramassait la neige et on la tassait au fond de la glacière où elle se transformait en glace. 
  • Les pièges à glace : on construisait les glacières proches des cours d'eau. Lors des premiers froids, on découpait à la hache des blocs de glace dans la rivière, puis on les transportait dans la glacière 

Dans les deux cas, on colmatait le tout avec des feuille et de l'herbe pour éviter la présence d’air qui faciliterait la fonte. Les glacières pouvaient produire 5 000 m3 de glace par saison.

Aux beaux jours, la glace était extraite puis acheminée la nuit sur le littoral avec des charrettes et des mulets, parfois à dos d'homme. Les « pains » de glace, de 50 kg, étaient empaquetés dans de grands sacs de jute, et emballés dans des branches de chêne, de sapin ou de hêtre. Il y avait forcément de la perte pendant le trajet, 50 % environ. 

Dans le Mercantour, les principales glacières retrouvées sont situées sur la commune de Moulinet (et sur la commune de Lucéram). Elles alimentaient surtout la zone littorale. Il en existe également dans la Vésubie qui servaient à alimenter la "Petite Suisse Niçoise", Saint Martin Vésubie, haut lieu du tourisme "climatique" à partir de 1860, et Nice également. La vente de la glace était une ressource non négligeable pour les habitants du haut-pays.

Certaines glacières, comme celle représentée ici, ont résisté au temps. Un petit patrimoine rural isolé, parfois anodin, qui témoigne pourtant d'un grand pan (de glace:-)) de l'histoire du Mercantour et qui inspire le plus grand respect pour ces montagnards qui ont su "dompter" ce liquide si précieux.

42194_pnm_malthieux-laurent-800px.jpg
Glacière à Trabuc © L. Malthieux/PNM

Source URL: https://mercantour-parcnational.fr/actualites/la-folle-histoire-de-la-glace