Parc national du Mercantour
Chargée de mission Agropastoralisme
"Je me suis rendue compte qu’on disait plein de choses, sur plein de monde et que souvent, c’était faux."
Portrait par Eric Lenglemetz
Recueil de témoignage par Noëlie Pansiot
Travailler au Parc
Je travaille sur l’agro-pastoralisme.
Mon rôle est d’arriver à comprendre les éleveurs et à les accompagner pour qu’ils prennent en compte le mieux possible les prescriptions environnementales qu’on leur demande dans un cœur de parc national. L’élevage, c’est le type d’agriculture prédominante dans le parc. C’est par ailleurs une activité qui cristallise différents sujets conflictuels, et notamment la prédation par le loup. Mon rôle, c’est d’essayer de faire en sorte que d’un côté éleveurs et bergers comprennent nos enjeux et que, de notre côté, on comprenne aussi la manière dont ils fonctionnent et la nécessité pour eux d’avoir cette activité économique et de la pratiquer de cette manière-là.
Je pense que c’est une opportunité qui s’est présentée à un moment. J’ai toujours voulu travailler dans l’environnement. J’ai fait un master agronomie, forêt et gestion des écosystèmes, j’étais déjà donc un peu là-dedans.
Mais c’est vrai qu’on arrive pas comme ça dans un parc national, c’est un peu le rêve de plein de gens !
On se fait plein de films aussi sur ce que ça peut être et je pense que quand tu travailles ou que tu as envie de travailler dans l’environnement, il y a toujours un jour où tu finis par vouloir aller dans un Parc national.
Des rencontres
Ce que j'aime, c’est de rencontrer plein de gens très différents et d’être toujours avec des personnes qui ont à coeur de bien faire leur métier, que ce soit les éleveurs ou les agents du parc. On est sur des métiers passion dans les deux cas. Du coup, chacun a forcément sa vision des choses, peut parfois être très buté, et moi il faut que j’arrive à prendre tous les positionnements et à trouver un compromis acceptable, c’est passionnant. En fait, je pense que je suis prête à tout entendre, car j’ai une position neutre et j’essaye de comprendre les arguments de chacun des partis. C’est le côté humain que j’aime beaucoup dans ce métier. Et grâce à lui, l’objectif de mon métier, sa finalité, c’est de protéger la nature.
Je me suis rendue compte qu’on disait plein de choses, sur plein de monde et que souvent, c’était faux.
En fait, on ne se rend compte de ce que sont vraiment les gens que quand on commence à leur parler, à les écouter et les comprendre.
Et ça c’est la plus belle partie du métier. Certains font de la provoc’ quand on arrive, mais quand on commence à les écouter, ils ont plein de choses à dire en fait. Parfois, ils ont juste besoin qu’on les écoute, des fois c’est juste ça. Et j’ai même l’impression que certains nous provoquent simplement pour qu’on prenne le temps de les écouter. J’aime bien ces moments, parce que parfois, justement dans la provocation, ils sont honnêtes. Je trouve qu’en abordant la discussion avec de l’honnêteté on arrive toujours à se comprendre à un moment ou à un autre.
Parfois, quand ils me parlent, certains éleveurs ou bergers commencent à me raconter toute leur vie, toutes leurs histoires. Parallèlement, je dois couvrir un territoire tellement grand que ce sont des contacts qui restent très ponctuels. Ponctuels mais profonds, intenses. C’est difficile car en même temps, il faut aussi que j’arrive à garder une certaine distance, car souvent je vais quand même leur demander de faire évoluer leur pratique agricole ou de faire les choses différemment pour des raisons qu’ils ne comprennent pas toujours non plus. Ce n'est pas toujours évident mais ils restent des collaborateurs, parce qu’on fait des choses avec eux. On n’arrivera pas à les faire sans eux.