Partager

Projet POIA Espèces arctico-alpines 2020-2022

Logo POIA arctico
 
Le projet POIA Espèces arctico-alpines est un projet qui s’intéresse à l’étude et à la conservation du lièvre variable et du lagopède alpin dans un contexte de changement climatique.
Financé par des fonds européens et le concours des collectivités et de l’État, le projet réunit 5 partenaires du massif alpin autour de plusieurs objectifs de conservation de ces deux espèces.

Les partenaires du projet sont répartis dans l’ensemble du massif alpin français :

Le projet se déroule sur la période 2020-2022 et est doté d’un budget total de 973 000 € dont 458 000 € pour le Parc national du Mercantour qui intervient comme Chef de file du projet.

Le projet POIA (Programme Opérationnel Interrégional du massif des Alpes) Espèces artico-alpines est un projet financé avec le concours de l’Union européenne. L’Europe s’engage sur le Massif Alpin avec le Fonds Européen de Développement Régional (FEDER 2014-2020).

Bandeau logos partenaires POIA
Bandeau logos partenaires POIA, par mancely

 

Bandeau logos financeurs POIA
Bandeau logos financeurs POIA, par mancely
j_mansons_lago_juin03-800px.jpg
lagopède alpin © J. Mansons / PnM
06360_pnm_ecr-800px.jpg
Lièvre variable © J. Blanc
_q3b0023-800px.jpg
© J. Mansons / PnM

Le changement climatique transforme profondément le massif des Alpes. La hausse des températures, particulièrement marquée au printemps (mars-mai) et en été (juin-août), entraîne des modifications du monde physique et des habitats naturels, qui abritent tout autant des activités humaines qu’une faune très spécialisée et adaptée à la haute montagne. Les impacts de la modification du climat sur les milieux naturels sont de mieux en mieux documentés mais certaines espèces, pourtant vulnérables, sont toujours peu étudiées.

 

La haute-montagne pour ultime refuge

Le lièvre variable (Lepus timidus) et le lagopède alpin (Lagopus muta) font partie de ces espèces spécialisées qui ont colonisé les Alpes après la dernière grande glaciation il y a environ 10 000 ans et qui se trouvent aujourd’hui menacées dans leur ultime refuge. Ces espèces dites “arctico-alpines”, souvent qualifiées de relictes glaciaires, sont distribuées au sein de l’arc alpin français depuis la Haute Savoie jusqu’aux Alpes maritimes. Toutefois, leurs aires de répartition actuelles sont aujourd’hui mal connues ou du moins pas à une échelle suffisamment fine pour que l’on puisse suivre leur évolution. Les connaissances lacunaires sur ces deux espèces ne permettent pas non plus de connaître leur degré de vulnérabilité vis-à-vis du changement climatique. Le lièvre variable et le lagopède alpin alpin vont-ils se déplacer, vont-ils réussir à s’adapter ? Ces deux espèces, emblématiques de la haute montagne, sont pourtant peu étudiées en raison des fortes contraintes physiques et climatiques qui rendent les conditions d’accès et de travail difficiles en haute altitude. Les évolutions technologiques récentes offrent de nouvelles opportunités qui permettent de lever en partie ces barrières.

 

Le changement climatique se traduit par des impacts multiples qui se combinent

Le schéma ci-dessous résume les impacts potentiels du changement climatique sur ces deux espèces. Ces impacts sont amplifiés par d’autres pressions humaines, en particulier la fréquentation touristique et le dérangement qu’il occasionne, le pastoralisme, et la fragmentation des habitats liée par exemple aux infrastructures (routes, remontées mécaniques, etc.).

 

Schéma POIA arctico
Schéma POIA arctico , par CREA

Les apports du projet POIA

Le projet POIA Espèces arctico-alpines » ambitionne donc de mieux comprendre la répartition et le devenir de ces deux espèces particulièrement vulnérables, en tenant compte de l’évolution climatique et des pratiques touristiques et pastorales dans leurs habitats.

Les actions envisagées doivent permettre d’accroître les connaissances sur la biologie, l’écologie et la répartition du lièvre variable et du lagopède alpin. Bien entendu, le projet s’intéresse plus largement aux habitats auxquels ils sont inféodés, à savoir les écosystèmes alticoles (subalpins, alpins et nival) de l’arc alpin. Le projet mobilise des techniques d’analyse génétique de pointe, des outils de détection en bioacoustique et des dispositifs de suivi par GPS afin de lever les contraintes d’accès aux milieux de qui hébergent ces espèces.

_q3b0019-800px.jpg
© J. Mansons / PnM
7q3b8356-800px.jpg
© J. Mansons / PnM
7q3b8306-800px.jpg
© J. Mansons / PnM

Les résultats obtenus doivent permettre d’alimenter les réflexions sur la gestion des espaces alpins dans un contexte de changement climatique. Les publics ciblés sont donc larges allant du grand public aux accompagnateurs et guide en montagne en passant par les éleveurs et les bergers par exemple. Par ailleurs, s’agissant de deux espèces qui font l’objet de prélèvements cynégétiques, les résultats obtenus intéresseront également les acteurs du monde la chasse.

Zooms sur quelques unes des actions du projet...

Modéliser la distribution du lièvre variable grâce à la génétique !

Le lièvre variable (Lepus timidus) est une espèce emblématique de la faune alpine dont la répartition reste largement méconnue à l’heure actuelle. Ce défaut de connaissances s'explique en partie par le fait que le lièvre variable est un animal essentiellement nocturne. En journée, il reste abrité dans des gîtes en mettant à profit son mimétisme pour ne pas être repéré de ses prédateurs. De plus, il vit dans des habitats de haute montagne dont l’étude est difficile compte-tenu des conditions d’accès et des conditions climatiques.

Le lièvre variable est difficile à observer en raison de son mimétisme et de son comportement nocturne et discret. Le développement des techniques génétiques (ADN environnemental) permet cependant aujourd'hui l'identification des espèces et des individus à partir de fèces récoltées sur le terrain et vient donc faciliter leur détection.

Depuis 2019, un nouveau protocole visant à préciser le statut d’occupation du lièvre variable à large échelle a été mis en place progressivement. Outre la distribution du lièvre variable, ce protocole permet également à moindre coût d’obtenir les mêmes informations pour le lièvre d’Europe.

En effet, dans un contexte de changement climatique, il est intéressant de connaître la dynamique respective des deux espèces qui partagent aujourd’hui des territoires contigus. Le scénario le plus probable actuellement se traduirait par une progression du lièvre d’Europe dans les secteurs actuellement occupés par le lièvre variable, ce dernier cédant du terrain en se réfugiant dans des zones situées plus haut en altitude.

Répartition lièvre variable et lièvre d'Europe
Répartition lièvre variable et lièvre d'Europe, par M.Ancely/PNM

 

 

 

 

Étude bioacoustique du lagopède alpin : des oreilles pour écouter la montagne chanter !

 

Le Lagopède alpin (Lagopus muta), tout comme le Lièvre variable est qualifié de relicte glaciaire. Espèce discrète et emblématique de la faune alpine, elle est aussi particulièrement menacée par les effets du changement climatique qui viennent se cumuler aux perturbations et dégradations de son habitat.

 

Les résultats des suivis conduits depuis 25 ans mettent en évidence une érosion progressive des effectifs de mâles chanteurs recensés au printemps dans une dizaine de sites répartis sur l’ensemble des Alpes. Cette régression semble particulièrement marquée dans les massifs périphériques des Préalpes et dans les Alpes du Sud, c’est à dire aux marges de l’aire de répartition actuelle de l’espèce.

 

La bioacoustique est complémentaire à l’observation directe tout en élargissant le champ d’investigation. Elle permet de détecter la présence de l’espèce par l’enregistrement et la discrimination des chants des mâles au printemps. Il devient alors possible de déterminer assez précisément le nombre de mâles chanteurs présents sur un site donné. Cette méthode passive et plus objective permet aussi d’enregistrer de grandes quantités d’informations sur un lieu donné et sur une période de temps plus longue en s’affranchissant des conditions climatiques qui peuvent gêner l’audition des sons émis. Les balises bioacoustiques deviennent alors de véritables oreilles qui écoutent la montagne au petit matin pendant deux mois consécutifs au printemps. Et la montagne chante !

 

Des sites seront suivis grâce à ce dispositif sur les territoires du Mercantour, des Écrins, du Dévoluy, du Queyras et du Mont-Blanc.

 

7q3b8423-800px.jpg
Installation d'une balise acoustique © J. Mansons / PnM
7q3b8382-800px.jpg
Installation d'une balise acoustique © J. Mansons / PnM

Expérimenter des dispositifs de quiétude et de protection pour le Lagopède alpin : Lago’Quiet

Les premiers résultats du suivi des oiseaux marqués avec des émetteurs GPS dans le Parc national du Mercantour semblent démontrer l’importance des zones préservées de tout dérangement (touristique ou pastoral) pendant la période de reproduction. Le taux naturel de succès de reproduction du lagopède alpin est relativement faible. Environ 1 poule sur 2 parvient à se reproduire chaque année. Cette poule a ensuite 1 chance sur 2 de réussir à mener ses poussins à l’âge de l’envol. La période de reproduction et les milieux qui y sont associés sont donc deux paramètres clefs pour la survie de l’espèce.

L’expérience acquise en la matière sur les zones de quiétude hivernale pour le Tétras-lyre a démontré une véritable efficacité pour améliorer les conditions d’hivernage de cette espèce en balisant les zones les plus sensibles (pour en savoir plus).

L’objectif du projet POIA Espèces arctico-alpines est de transposer le dispositif de quiétude au lagopède alpin pendant la période estivale. Il peut s’agir d’équipements permettant de canaliser les flux de randonneurs à proximité des zones de reproduction lorsque la perturbation est d’origine anthropique ou de mesures de report ou de défens de pâturage lorsque la perturbation est liée à l’activité pastorale. Les deux situations appellent des mesures spécifiques avec des moyens dédiés qui devront être testés sur le terrain afin d’en évaluer l’efficacité. Pour ce qui relève en particulier des mesures liées à l’activité pastorale, les éléments issus de ce travail permettront d’alimenter les réflexions à venir sur la définition des cahiers des charges des futures mesures agrienvironnementales.

lagoquiet_7.jpg
Installation du Lago'quiet © J. Mansons / PnM
lagoquiet_8.jpg
Installation du Lago'quiet © J. Mansons / PnM
lagoquiet-11-800px.jpg
Installation du Lago'quiet © J. Mansons / PnM

Former des relais d’information : des gardiens de refuge pour veiller sur les montagnes ?

Les refuges de haute-montagne constituent une cible particulière des actions de sensibilisation du projet. Ils sont en effet des lieux privilégiés pour la sensibilisation des randonneurs et des usagers aux bonnes pratiques vis-à-vis du dérangement des espèces sensibles. Les gardiens de refuge en particulier ont généralement une connaissance pointue de leur environnement et de son évolution. Ils peuvent ainsi jouer un rôle important dans l’observation in situ mais aussi en tant que vecteur de sensibilisation.

Les accompagnateurs en montagne sont aussi d’excellents relais d’information auprès du grand public. Des temps de formations destinés aux accompagnateurs en montagne et autant que possible aux gardiens de refuge seront prévus, avec un triple objectif :

  • générer une collecte de données d’observation, de témoignages historiques, etc. auprès des accompagnateurs et des gardiens,
  • sensibiliser ces acteurs sur les secteurs et les périodes-clefs (pour la reproduction en particulier) et pour le cas échéant les inciter à adapter leur pratique,
  • relayer les connaissances disponibles auprès de leurs clients randonneurs à la fois sur le fonctionnement de ces espèces mais aussi sur leur vulnérabilité et les bons gestes à adopter.