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L'ABC de Sospel

Logo ABC Sospel
Logo ABC Sospel, par C. Mantero

 

Qu’est ce qu’un ABC ?

Les Atlas de la biodiversité communale (ABC) ont été initiés en 2010 par le ministère de l’Écologie, de la maîtrise de l’Énergie et du Développement durable. Celui de Sospel a débuté en 2018 et s’est terminé en 2020. Ce programme, entièrement financé par l’Office Français de la Biodiversité et porté par le Parc national du Mercantour, a plusieurs volets. Le principal objectif est centré sur la connaissance, le parc national a donc réalisé un état des lieux des données concernant la biodiversité et les paysages à l’échelle de la commune, complété avec des inventaires ciblés sur les groupes les moins connus ou ceux qui comportaient des enjeux particuliers. Les échanges et les rencontres suscités par le programme ABC ont également été l’occasion de découvrir ou de redécouvrir la biodiversité qui nous entoure et de sensibiliser le public, notamment à travers plusieurs animations et supports de communication. Enfin, ce programme constitue un moyen de renforcer l’attractivité de la commune en valorisant le patrimoine naturel qui s’y trouve au profit de tous.

 

Pourquoi faire des inventaires ?

L’intérêt de cette démarche est à la fois de mieux connaître la biodiversité présente pour en tenir compte lorsque des projets risquent de l’impacter. Mais les inventaires réalisés ont également un intérêt à une plus large échelle pour évaluer le statut des espèces. Ils contribuent enfin à la connaissance de la biodiversité en général. Des études spécifiques ont donc été réalisées sur les chauves-souris, les criquets et les sauterelles, les pollinisateurs sauvages (abeilles et syrphes) ainsi que sur la flore. De plus, le parc national a organisé en 2018 un évènement scientifique à Sospel baptisé Explor'Nature. Celui-ci a permis de rassembler 40 scientifiques et naturalistes chevronnés qui ont arpenté le territoire de la commune à la recherche d’espèces encore non connue de la commune. A l’issue des prospections qui s’étalaient sur quelques jours, plus de 2 700 observations ont été réalisées et ce sont 940 espèces inconnues sur le territoire de Sospel qui ont été ajoutées. L’ensemble des résultats peut être consulté ci-dessous :

 

Les résultats

Les résultats de l’ABC sont impressionnants car le nombre d’espèces connues à Sospel est passé de 2 180 à 3 669. Pour mettre ces chiffres en perspective, le tiers des espèces recensées dans le Mercantour sont présentes à Sospel. Pour certains groupes, la diversité est particulièrement remarquable : c’est par exemple la moitié des papillons de jour de France métropolitaine que l’on trouve ici, ou encore un tiers des mammifères terrestres de France (et la moitié des chauves-souris connues en France). Concernant la flore, près du quart des espèces connues en France ont été recensées à Sospel également, ce qui est remarquable notamment lorsqu’on rapporte la superficie de Sospel à l’échelle du territoire métropolitain, à peine plus d’1/10 000ème !

Concernant la faune, ce ne sont pas moins de 2 332 espèces animales qui ont été recensées sur la commune, dont 39 mammifères, 137 oiseaux, 15 reptiles, 6 amphibiens et 2 135 invertébrés (principalement des insectes). Parmi ces espèces, certaines sont très emblématiques, comme la loutre. Découverte en Bévéra et en Roya en 2019, il y a encore beaucoup de choses à découvrir à son sujet dans nos vallées. Mais plusieurs indices de présence ont été observés à Sospel, y compris depuis le passage de la tempête Alex. Toujours chez les mammifères, les chauves-souris sont bien présentes à Sospel avec plusieurs colonies bien identifiées et remarquables dont certaines sont importantes à l’échelle nationale. Il y a également des espèces présentes à Sospel qui ne sont pas connues ailleurs dans le Parc, comme le minioptère de Schreibers ou le murin de Capaccini. Ce dernier, trouvé à Sospel pendant l'Explor’Nature en 2018, est une espèce d’affinité méditerranéenne et est parfois qualifié de « murin pêcheur ». En effet, il utilise les zones les plus calmes de la rivière pour capturer ses proies, se servant de l’écholocalisation reflétée par la surface de l’eau comme d’un miroir.

Chez les oiseaux, on peut citer le hibou Grand-Duc dont au moins deux couples sont présents (Gorges de Piaon et Pont de Caï), le tétras-lyre qui est limite de sa répartition et qui trouve à Sospel les individus les plus proches de la mer. Sont aussi présentes plusieurs espèces menacées, comme la pie-grièche écorcheur ou la caille des blés.

Chez les insectes, c’est le groupe des papillons de jour qui est le plus remarquable avec la présence notamment de deux espèces très rares et très menacées en PACA, la vanesse des pariétaires et l’hermite. Encore bien présente et commune dans tout le Sud-Est de la France il y a une cinquantaine d’année, la population de cette espèce a diminué de plus de moitié et elle ne survit plus que dans quelques rares endroits dont Sospel. On peut même l’observer dans le village où elle utilise les murs envahis de pariétaires (gambaroussette) pour pondre ses œufs.

Chez certains groupes bien étudiés à Sospel il y a aussi de belles surprises, c’est le cas des syrphes. Une espèce encore non décrite et jamais observée a été trouvée sur les adrets autour du Col de Braus, Merodon « species nova » car elle n’a pour l’instant pas de nom. Une espèce de syrphe très menacée et en régression a également été rencontrée à Sospel. Il s’agit de Sphiximorpha subsessilis. Bien que son apparence la fasse ressembler à une guêpe, cette mouche est complètement inoffensive. Elle utilise les coulées de sève sur les très vieux peupliers présents dans la ripisylve de la Bévéra pour pondre ses œufs.

 

Pour la flore, le parc national a recensé 1 126 espèces qui bénéficient de divers paramètres : un climat méditerranéen et montagnard, un relief varié, un cours d’eau, la Bévéra, dont les nombreux affluents ont façonné des gorges et une plaine alluviale, des pentes aménagées en terrasses, et, enfin, l’omniprésence des forêts qui confèrent à la commune une forte identité paysagère à quelques kilomètres du littoral méditerranéen. On y rencontre par exemple 43 espèces différentes d’orchidées comme les ophrys, un genre regroupant plusieurs espèces de répartition méditerranéenne. Certaines sont assez communes, l'ophrys bécasse, l'ophrys noir, ou encore l'ophrys bourdon. Mais l'espèce la plus rare est l'ophrys de Bertoloni, affectionnant les pelouses sèches rocailleuses et les terrasses plus ou moins à l'abandon. Une autre orchidée attire l’oeil par sa morphologie inhabituelle, c’est le sérapias à pétales longs, une espèce méditerranéenne. Une autre espèce très remarquable à Sospel est le chêne chevelu dont quelques peuplements existent dans le haut du vallon de la Fighetta, vers le col de Braus, dans le Guiou ou autour du col de Brouis. Il n’y a que deux ensembles forestiers où on le rencontre en France, à Sospel et dans les environs de Grasse. Son habitat est très fragmenté et en déclin, c’est pour cela qu’il est actuellement classé vulnérable sur la liste rouge des plantes vasculaires de PACA. Pour le reconnaître, il faut plutôt se fier au chapeau de ses glands : ceux-ci ont des trichomes, sortes d’excroissances, qui font penser à des cheveux. On peut également citer la centaurée des Alpes dont l'unique station en France se trouve dans le secteur du mont Cuore, où elle se développe en pleine lumière dans les fissures. Il y a également plusieurs espèces endémiques, c’est-à-dire très localisées, qui sont également présentes comme le cytise d’Ardoino, la gentiane de Ligurie ou encore l’euphorbe de Canut. En plus de leur endémisme, toutes ces espèces sont rares et menacées, Sospel joue donc un rôle important dans leur conservation.

Ce qu’il faut retenir

Sospel présente plusieurs grands atouts en termes de biodiversité. Elle bénéficie à la fois des influences marines et montagnardes et d’un gradient altitudinal important. Elle dispose de grands ensembles forestiers mais également de milieux ouverts et semi-ouverts bien représentés. Son réseau de cours d’eau est composé d’une multitude de petits affluents toujours en eau qui connectent tous les habitats entre eux. C’est pour cela qu’on y retrouve une flore et une faune particulièrement riches. La présence des espèces qui composent cette diversité est remarquable car celles-ci se trouvent souvent dans des situations peu communes : parfois plus éloignées de la côte qu’à l’accoutumée, parfois, à l’inverse, à une altitude plus basse ou plus élevée que dans les autres stations montagnardes connues. On y rencontre également un grand nombre d’espèces endémiques. Cela illustre bien la typicité et le contraste que l’on peut observer dans le paysage sospellois, mais cela implique surtout que Sospel constitue un refuge pour de nombreuses espèces ou habitats menacés et patrimoniaux et a donc une forte responsabilité dans leur conservation à une échelle régionale voire nationale.

Dans les années à venir, il faudra donc veiller, dans la mesure du possible, au maintien des trames paysagères et à l’amélioration des connaissances, notamment en ce qui concerne les zones humides.

 

Les documents :

 

La plaquette de présentation :

Le rapport :

Le poster :

La liste exhaustive des espèces :